jeudi 5 septembre 2013

Le séjour à Villingem : la serrurerie et proposition étrange.

Arrivé au Stalag de Villingen, camp disciplinaire, j'ai été débarassé de mes effets civils et mis en prison pour 10 jours. Après ces 10 jours je devais faire en plus un mois de travaux assez pénibles dans le camp. Dés mon arrivée à ce camp j'ai demandé que l'homme de confiance me rencontre. Je lui ai exposé mon changement de champ. Il m'a rassuré que je resterais là, j'étais un cas parmi d'autres, en effet pour me remettre à mon Stalag à Augsbourg, un soldat allemand aurait 1200km à faire par chemin de fer. 40 jours ont passé au camp disciplinaire - nous étions en mars 1941. J'avais oublié mon echec de la première évastion - ma complice ne pouvait avoir eu d'ennui -cela aurait été pour moi un cas de conscience grave. Tout avait été étudié et imaginé dans les moindres détails. J'étais serein et décidé à passer à une deuxième évasion assez rapidement.
Une petite entreprise de Villingen cherchait un serrurier parmi les PG du Stalag. Je n'ai pas hésité à poser ma candidature pour ce travail. De toute façon j'avais décidé de ne plus m'évader en partant directement du camp. Les difficultés étaient grandes et dangereuses.
Pour réussir il fallait s'évader d'un commando en vêtements civils ce qui était impossible en partant du Stalag (barbelés, soldats en arme-chiens etc...)
Le lendemain je partais du Stalag pour la serrurerie. J'ai pris contact avec la patronne-propriétaire de l'entreprise. L'atelier n'était pas grand - un tour, une fraiseuse, un étau limeur, une poinçonneuse, une cisaille électrique, matériel moderne et en bon état. Quelques jours après mon arrivée la patronne, qui parlait assez bien français, me disait que son mari était en prison à Konstanz depuis le début de la guerre, il n'en sortirait, m'a-t-elle dit, qu'après la guerre et encore si l'Allemagne était perdante, ce qu'elle espérait, étant antinazi. Mon travail était intéressant du point de vue professionnel. Je construisais de l'outillage destiné à la fabrication de brosses de toutes sortes. La nourriture était bonne. Je recevais en plus une bouteille de bière le matin et une autre l'après-midi. Une sentinelle m'amenait à l'atelier le matin à 7 heures et me ramenait au Stalag tous les jours à 18h. Je ne prenais plus mes repas au camp. Un mois plus tard nous recevons la visite de 2 civils genre Gestapo - imperméable noir, chapeau mou bord bien incliné vers l'avant. But de la visite : proposition de me transformer en civil. Je recevrais une carte d'identité me permettant de circuler en Allemagne comme un Allemand. Je serais rémunéré comme un ouvrir qualifié avec possibilité de prendre mes repas où cela me plairait et je logerais à l'hôtel où cela me plairait. Condition : je ferais une déclaration écrite sur l'honneur de ne pas me rendre dans un autre pays sans autorisation. J'avais également à donner l'adresse de ma famille en France. Père, mère, épouse, frères et sœurs. Je devais également donner ma signature une fois par mois au service des étrangers. Je l'ai laissé parler pour répondre que je n'étais pas d'accord. Ils ont un peu insisté, sans menaces, en me disant que beaucoup de PG français avaient accepté et étaient satisfaits. Le lendemain la patronne m'a félicité de mon refus sans doute par opposition au régime Nazi et peut être aussi dans l'intérêt de son entreprise.

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