dimanche 20 octobre 2013

Juillet 1941 : les préparatifs de la seconde évasion s'achèvent.

Le directeur passait assez souvent au réfectoire pour nous demander si nous avions rien à réclamer - c'était bien la collaboration. La politique de Pétain était franchement bonne pour les PG. La mentalité des Allemands de ces régions (Forêt Noire et Rhin touchant la France) était très différente des autres régions de l'Allemagne. Je savais qu'une évasion allait compromettre le confort des autres PG, mais moi problème n'était pas une bonne planque pendant la guerre. Moi je ne pensais qu'à la cavale contre la soumission et pour la liberté sans autre considération. Les semaines passaient - arrivé le 22 juin 1941 ( on ne peut oublier la date) [note : l'Armistice entre la France et l'Allemagne a été signée le 22 juin 1940 ] . Le directeur en passant s'arrête près de moi et me dit nerveusement : l'Allemagne vient de rentrer en Russie, nous avons perdu la guerre. Je le savais déjà par notre poste de radio. Je ne pouvais lui dire ce que je pensais, cela était le plus beau jour de mes 15 mois de captivité. Tous les allemands et allemandes étaient consternés. Ils ne pensaient pas que Hitler aurait été jusque là. 8 jours après une ouvrière de l'atelier de moins de 20 ans venait d'apprendre que son mari avait été tué. 3 jours après elle reprenait le travail vêtue de noir. Nous, les PG, avons coupé quelques roses dans le parc de l'usine et avons posé le bouquet sur sa machine. Elle nous a fait quelques signes de remerciements discrets. Il est temps d'envisager mon départ pour le Rhin à Brisach, mais il me manquait des vêtements civils usagés. Mon ami Freder va petit à petit sonder la balayeuse qui lui promet d'essayer de faire le nécessaire. Le lendemain elle propose un pantalon à jambes courtes en cuir clair, une chemise allant avec et un chapeau vert garni d'une plume. Le pantalon avec bretelles en cuir blanc garnis d'EDELWEISS et une paire de souliers pointure 43. Elle demande le tour de taille pour le pantalon et la pointure pour le chapeau. Mon ami Freder qui parle l'allemand comme le français la rassure qu'en cas d'échec personne ne saura jamais la provenance de ces vêtements. Pas nécessaire de faire un paquet tout sera posé en vrac dans le placard directement en dessous de mon étau. Je collerai un petit papier blanc sur la porte à ouvrir le placard. Cet équipement devait être en place le jour que j'indiquerai - cela sera un jour de la dernière semaine de juillet. La femme dit à Freder qu'elle était honteuse pour ces effets volés à son frère qui se battait en Russie. Elle a demandé que je promette de ne pas reprendre les armes contre les Allemands. J'ai attendu 4 jours avant qu'elle confirme que les vêtements seraient prêts. Elle placerait les vêtements le jeudi, je pourrais m'assurer le vendredi que tout était en place.





Notes :
-15 mois de captivité : donc on en déduit que Marius a été arrêté vers le 22 mars 1940...
-Pour me faire une idée je me suis amusée à faire un itinéraire entre Villigen et Brisach à pieds, google maps donne une distance de 84,5km et 17h30 de marche.
-on remarque que les relations des français et allemands, des "petites gens" ne sont pas dans le conflit ... finalement eux subissent tous la guerre politique...

dimanche 13 octobre 2013

Avril 1941 - travail et communication.

2 seuls PG étaient au courant de mes projets, le cuisinier et un ex adjudant du 42e régiment d'infanterie que j'ai connu pendant la guerre au Rhin en 39-40 adjudant FREDER, un alsacien, c'était mon seul copain. Comme je l'ai dit, les 20 PG se trouvaient enchantés de leur position. Je suis d'accord avec eux pour cela. Mon travail à l'Atelier était le plus intéressant. Les autres PG passaient leur temps à coller des étiquettes., poinçonner sur machine, estamper des pièces, meuler des bavures etc... Mon travail demandait une certaine adresse dans des ensembles mécaniques de meubles de classement, des classeurs métalliques eux-mêmes. Ce travail demandait de la précision. Il fallait être un peu du métier. Je n'étais pas "aux pièces" heureusement, je n'aurais pas beaucoup gagné. Mais mon travail était fait avec un peu de fierté à l'entière satisfaction de nos "maîtres". Mon atelier au même niveau que le plancher du bureau du Chef d'Atelier séparé par une cloison vitré, un établi très soigné avec étau, une perceuse et une meule électrique, un marbre, un trusquin etc. Sous l'établi des placards inoccupés, un outillage complet de précision. Les placards sous l'établi vont jouer un petit rôle dans mes préparatifs d'évasion. Le bureau et mon atelier étaient balayés deux fois par semaine par une bonne, grosse allemande qui semblait être l'amie du Feldwebel. Elle aimait plaisanter et j'aimais l'amuser avec mes blagues. Entre nous une camaraderie s'est réalisée. Nous étions vers la fin avril 41. Deux mois viennent de passer. J'avais de temps à autres la visite du Directeur qui me parlait des relations entre nos deux pays. Il comptait beaucoup avec Pétain. Il me disait que je pourrais travailler en Allemagne et faire venir ma famille. Je lui disais qu'on ne pouvait rien prévoir, la guerre étant loin d'être terminée pour l'Allemagne. Je ne lui ai pas caché que je souhaitais l'entente entre nos deux pays - mais sans esprit de domination de l'un sur l'autre.


note :
bon j'ai fait des recherches pour retrouver des traces de cet adjudant alsacien mais je n'ai rien trouvé sur le net (après j'ai pas cherché trois heures et je n'ai sans doute pas les bonnes adresses documentaires.